Une fin après midi dans un centre commercial, il n'y avait rien de mieux ou presque. Le shopping était l'une des seules choses qui me détendait réellement et au vu des choses qui s'était passé aujourd'hui, j'avais besoin de cela. J'avais passé la journée avec Sebastian, tout avait été parfait, j'étais même prête à me lancer dans une relation sérieuse. Mais il y avait eu W. Totalement troublée, j'avais mis le jeune homme dehors et j'avais filé au centre commerciale. Son message repassait en boucle dans ma tête. Avait-il dit cela simplement pour me faire peur ? Etait-ce la vérité, Sebastian avait des choses sombres à cacher ? Je m'arrêtais devant un magasin de chaussures et secoua la tête. Ça suffit, maintenant tu te détends Alexa !
Je regardais la boutique sans entrée dedans, j'évitais au maximum de rentrer dans les magasins de chaussures où je sortais forcément avec une plusieurs paires. C'était mon péché mignon. Je continuais ma route avant de craquer pour des escarpins.. Non loin de là, j’assistais à une scène ce qu'il y a avait de plus banale. Mais je ne sais pour qu'elle raison, je m'avançais vers la jeune fille. Une fois à son niveau, je lui fis mon plus beau sourire.

- Je suis désolée, je suis en retard. Tu as encore des ennuis parce que je t'ai demandé d'acheter des cigarettes pour moi ?

Je souris au cassier qui regardait la demoiselle d'un oeil mauvais. J'avais vu au loin une fille qui tentait de passer en caisse avec des cigarettes mais apparemment, le caissier n'était pas du genre commode. Je reposais les yeux sur la demoiselle attendant un réaction de sa part.

Ce matin, en voyant que j'arrivais à la fin de mon dernier paquet de cigarettes, je n'avais pas tardé à aller au Beverly's pour le ré-approvisionner. Non pas que je sois une grosse fumeuse, oh non, loin de là ! Quelques unes chaque semaine, tout au plus. Mais je fumais dans des moments de stress, pour calmer mes nerfs, comme pour me raccrocher a quelque chose. Je savais pertinemment que ça n'étais pas une solution, et que j'avais de la chance de ne pas encore y être totalement accro. Mais rien à faire, j'avais besoin d'avoir un petit stock en cas de coup dur. Et puis, mon père n'étant presque jamais à la maison, je n'avais même pas la crainte d'être découverte pour me dissuader.

Comme à chaque fois donc, j'allais au bureau de tabac du supermarché, faisait la queue, et demandait un paquet, un seul, au caissier, en lui disant que oui, j'étais bien majeure, ou bien oui, c'était pour mes parents qui m'avait envoyée là pendant qu'ils finissaient de payer dans une autre boutique. En général, avec les caissiers que je connaissais, ça passait crème. Mais celui là, un jeune, sur lequel je n'étais jamais tombée, voulait sans doute bien faire son travail, et me demanda un document d'identité prouvant ma majorité, même si je disais ne pas les acheter pas pour moi. Déstabilisée, et dans une situation un peu délicate pour le coup, je me mis à fouiller dans mon sac à main, en cherchant ce papier imaginaire, espérant qu'il s'impatienterais et me vendrait ce paquet sans faire d'histoire. Effectivement il s'impatientait, mais n'était pas décidé à me croire. Au bord du désespoir, j'entendis alors une femme lancer:

- Je suis désolée, je suis en retard. Tu as encore des ennuis parce que je t'ai demandé d'acheter des cigarettes pour moi ?

Je tournais vivement la tête vers elle, avec un sourire un peu crispé. C'était une jeune femme blonde que je n'avais jamais vu auparavant. Son sac dont je reconnaissais la provenance, en revanche, témoignait qu'elle sortait d'une petite escapade shopping. Je rentrais immédiatement dans son jeu, et me retournait vers le caissier, qui lui aussi avait entendu la blonde, et plantait mon regard dans le sien en haussant les sourcils, l'air faussement hautaine et vexée qu'il ne m'aie pas cru. Aussitôt, il me donna le paquet que je demandais, je le paya, et sortit aussitôt de la boutique, pour rejoindre ma "sauveuse" qui était déjà dehors.

-Je me contenterais bien de vous remercier et vous donner toute ma gratitude pour l'aide que vous venez de m'apporter, si seulement ma courte vie ne m'avait pas apprise que les trois quarts des inconnus vous aidaient pour que vous leur soyez ensuite redevable, lui dis-je en souriant pour ne pas non plus lui paraître froide. Après tout je lui étais infiniment reconnaissante de m'avoir sorti de ce petit pétrin, mais malheureusement dans cette société, la générosité spontanée se faisait rare. Ou alors, c'était juste j'avais eu jusqu'ici la malchance de tomber sur les mauvaises personnes.

La journée avait été des plus mouvementé mais je m'étais dis qu'un virée shopping me ferait le plus grand bien. Ce qui avait été le cas mais je n'avais pas pu m'empêcher d'écouter une conversation entre une cliente et un caissier. Et je ne sais encore moins pourquoi j'ai été prendre sa défense et l'aider. Alors qu'elle entrait rapidement dans mon jeu, je vis le caissier perplexe. Mais il était clair que j'avais l'age pour fumer donc le fait qu'elle demanda des cigarettes et avec mon arrivée, le caissier ne pourrait pas faire autre chose que lui vendre le paquet. Je lui dis que j'allais l'attendre dehors en attendant qu'elle paye.
Je regardais une boutique en pensant à Sebastian quand je vis le reflet de la brunette dans la vitrine. Je me retournais et lui souris. Mais sa phrase, bien qu'elle souriait, me fit l'effet d'une douche froide. Je ravalais mon sourire en la regardant de travers. Non mais elle se prenait pour qui, je venais de l'aider pour être gentille -pour une fois- et elle était limite entrain de me le reprocher ? Je me resaisis rapidement et la regarda froidement.

- De rien. Heureuse de t'avoir pu aider. Salut.

Mon ton avait été froid et mon visage était devenu impassible. Au moins comme ça, elle comprendrait qu'elle n'avait pas été très poli et qu'elle n'avait aucun tact. J'attrapais mon sac et la contourna pour reprendre mon occupation première, le shopping. J'avais envie de me retourner pour voir la tête qu'elle faisait mais je me retins.

J'avoue, j'avoue, c'était pas la réponse qu'une lycéenne était censée sortir dans cette situation. Une lycéenne normale, déjà, ne fumerait pas, et quand bien même, se contenterait de sortir un "merci", les yeux brillants de reconnaissance, avant de reprendre son chemin. Bien sur, moi, la normalité, ça faisais un moment que j'avais zappé. Depuis Columbia, en fait. Tu peux pas rester dans le droit chemin bien longtemps, ceux qui se promettent de jamais déraper, c'est comme ceux qui pensent pouvoir changer le monde, faire de la diplomatie, avec pour seul bagage tout leur volonté. Ça relève de l'utopie.

C'est tout aussi utopique que ce que devait penser cette jeune femme qui m'a aidée: Que je partirais dans demander mon reste. Voilà sans doute pourquoi le sourire s'évanouissait sur son visage, et pourquoi elle lâcha une réponse cinglante, avant de tourner les talons.

"De rien. Heureuse de t'avoir pu aider. Salut"

C'était légitime. Je m'étais pas contentée de lui être reconnaissante, j'avais presque glissé une pique dans ma réponse sans le vouloir, alors il était normal qu'elle s'en aille. Mais j'avais un petit pincement au cœur. La pauvre, elle avait été sympa avec moi, et je l'envoyais presque bouler. Et d'un autre côté, je détestais cette politesse que les gens se sentaient obligés d'avoir même quand ils étaient totalement exaspérés. Je m'engageais à sa suite d'un pas rapide, et me plantait devant elle, la fixant droit dans les yeux. Quitte à ce que cette rencontre se passe mal, autant me dire que c'était totalement de ma faute, non ?

"Heureuse d'avoir pu m'aider ? Tiens c'est drôle, c'est pas ce que je pourrais penser en voyant votre air..." disais-je sur un ton presque gamin, en me parant d'un sourire qu'on aurait pu croire naturel, mais qui était aussi sincère que sa politesse d'il y a deux minutes. C'est alors que je m'interrompais, car entre temps j'avais fait le lien entre son sac en plastique qui sortait d'une boutique de chaussures à quelques pas de là, et une espèce d'étincelle triste dans les yeux de la blonde. Une thérapie-shopping ? je serais pas loin de le parier. En tout cas, ma réplique était un peu mal venue, et je changeais d'un coup de visage, d'intonation. Doucement, je poursuivais:

"Je pourrais presque penser en fait que... En ce moment vous ne l'êtes pas du tout...".
J'avais à peine prononcé les derniers mots. Elle avait clairement l'air d'avoir besoin d'un remontant moral. Si j'avais pas été en mauvaise posture dans cette situation, j'aurais aimé l'aider. Sauf que pour l'instant, nos échanges étaient pas très amicaux. Le mieux que j'avais à faire, c'était m'effacer.

"Je suis désolée pour tout à l'heure. Je... vais pas vous ennuyer plus longtemps. Bonne après-midi et... merci encore" dis-je, mal à l'aise, en faisant un lentement un pas de côté pour la laisser passer.

Je ne m'attendais absolument pas à une réplique de ce genre, je m'attendais plus à ce que la jeune femme me remercie et que soit on commence à discuter soit que chacune reprenne sa vie mais certainement pas à des reproches. Elle voulait m'envoyer balader, elle n'allait pas être déçu. J'avais eu ma bonne action de la journée et ça n'avait pas plu à la demoiselle ? J'avais autre chose à faire que de m'occuper des caprices d'une ado !
Alors que je reprenais le chemin des magasins, elle vint se placer devant moi. Si elle me cherchait, elle n'allait pas être déçue !

- Heureuse d'avoir pu m'aider ? Tiens c'est drôle, c'est pas ce que je pourrais penser en voyant votre air...

J'écarquillais les yeux de surprise, mais elle voulait vraiment m'énerver ou quoi ? Elle me cherchait ? Et bien elle m'avait trouvé et cela n'allait pas lui plaire. J'ouvrais la bouche pour répliquer mais je vis son expression changer du tout au tout, et avant même que j'ai pu prononcé quoi que ce soit, elle reprit la parole. Ses propos me firent repenser à ma présence ici et à mon besoin de faire les boutiques. Rien que le fait de penser à Sebastian et à W firent partir le peu de bonne humeur que j'avais retrouvé. Elle se poussa finalement de mon chemin en s'excusant. Je ne savais toujours pas quoi dire, la belle brune m'avait totalement désarçonnée. Moi qui d'habitude avait toujours une réplique ou un bon mot de coté, rien ne me venait.
Je fis quelque pas et m'arrêtais avant de me retourner lentement pour faire face à la jeune femme. Je ne pouvais pas partir sans rien répondre, je ne pouvais pas lui laissé avoir le dernier mot. Je me plaçais en face d'elle et fronça les sourcils.

- Pourquoi tu as réagis comme ça à propos des cigarettes ?

J'avais dis la première chose qui m'était venu à l'esprit, même si je mourrais d'envie de lui parler de ma journée. J'avais besoin d'un avis objectif, de quelqu'un qui ne connaissait pas Seb et surtout, qui ne me connaissait pas moi.

{Désolée pour le temps que j'ai mis à répondre mais ça y est ! Je tacherais de faire plus vite la prochaine fois Dia'  }

La femme me jeta un regard un peu mauvais et s'éloigna. Je la fixais un instant avant de décider de faire demi-tour moi aussi, mais au moment ou je m'apprêtais a reprendre mon chemin elle se retourna et me demanda:

- Pourquoi tu as réagis comme ça à propos des cigarettes ?

Coupée dans mon élan, je tournais la tête vers elle, béate. Que répondre a ça ? En quoi ça l'intéressait ? La blonde me surprenait décidément. Il y a dix secondes elle aurait été prête à me fusiller, et là, elle sortait cette question. Je ne savais pas si je devais reprendre mon attitude froide ou rester aimable. J'optais pour cette deuxième solution, après tout, j'étais quand même bien élevée et je je tenais pas à provoquer un conflit pour quelque chose d'aussi stupide.

"Tout simplement parce qu'à mon âge, et avec mon passé, on ne sait pas ce que les gens ont derrière la tête, et vous serez sans doute d'accord que l'atmosphère de cette ville contribue à entretenir la méfiance. Alors voilà, je me méfie, parce que je ne vous connais pas et que je ne veux pas me dire que j'ai des dettes, même petites, envers les gens." répondis-je sur un ton neutre. "A moi de vous poser une question: pourquoi vous avez l'air si déprimée ?" ajoutais-je, compatissante.

Cette rencontre éphémère risquait bien de ne plus être si éphémère que ça. Ça tombait bien, je n'avais rien a faire. J'avais tout le temps de discuter avec cette femme blonde qui m'intriguait de plus en plus.

Nouveau message

Expéditeur: Unknown
Destinataire: Rachel D. Aerenson
Message reçu, aujourd'hui.

Avec ton passé ? Tu en parles comme si tu avais tant de choses à garder secrètes mais cela dit, c'est peut-être le cas après tout personne ne sait ce que contient la petite boîte cachée dans ta chambre ...
-W

Ma rencontre avec la brunette m'avait quelque peu surprise, je ne m'attendais absolument pas à ce qu'on m'envoi baladé de la sorte. Personne n'avait agis ainsi avec moi, enfin, personne après que j'ai souhaité lui venir en aide. Car il faut avouer qu'on m'avait déjà envoyé promené et bien pire que cela. Le fait que finalement elle s'excuse me fit réfléchir sur son comportement. De plus la demoiselle m'expliqua en détails les raisons de son ton glacial.
Elle ne savait pas faire confiance, une chose que je comprenais tout à fait et je me demandais subitement si j’agissais de la même manière qu'elle venait de le faire quand moi même, j'étais incapable d'accorder ma confiance. Finalement, la demoiselle n'était peut être pas une petite pétasse qui se croyait tout permi. Je passais ma main dans mes cheveux en hochant la tête.

- Non, je comprend tout à fait ce que tu peux ressentir. Et il est vrai qu'à Lakeview, les apparences sont trompeuses mais tu sais, il y a certaine personne qui font des choses sans arrières pensées. Comme ce que je viens de faire. Tu avais l'air embêté et je t'ai simplement aidé, fin de l'histoire.

Je lui souris et m’apprêtais à repartir, je n'avais pas répondu à sa question et j’espérais qu'elle avait oublié qu'elle l'avait posé mais à en croire par son expression, la jeune femme ne comptait pas me laisser partir comme ça. Je poussais un soupir et hocha la tête.

- Je ne suis pas déprimée, je me sens juste débile d'agir comme une gamine. C'est à propos d'un homme mais de toute façon, je pense que je ne le reverrais plus.

Je regardais la demoiselle pour tenter de savoir si ma réponse lui allait mais je n'en étais pas persuadée. Je ne sais pour qu'elle raison je lui proposais d'aller pour un verre ensemble mais la proposition était lancée.